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Remédier au dérapage budgétaire : Il faut se rendre à l’évidence


“Toute levée non étudiée et précipitée sous la contrainte de la pression des bailleurs de fonds va générer inéluctablement des dérapages ailleurs et on va en payer, finalement, le prix encore plus cher”, avertit Nafaâ Ennaifer.


Pour Nafaa Ennaifer, membre de l’Utica et fervent défenseur des intérêts de l’industrie tunisienne, il n’est pas possible de traiter la question de la  réforme des subventions sans s’attaquer, avant tout, aux “vrais problèmes” qui laminent le budget de l’Etat. Etant la dernière de la liste des réformes à faire, la refonte du  système de compensation ne devrait pas avoir lieu, affirme Ennaifer, tant qu’elle n’est pas inscrite dans le cadre d’une vision claire avec des objectifs assignés. “S’il y a quelque chose qui doit être touchée en dernier, c’est bien les subventions“, explique vivement le syndicaliste.

Il a précisé, à cet égard, qu’il est judicieux de  “commencer par le commencement”, en analysant, “les véritables causes de nos problèmes aujourd’hui”. Et d’ajouter que la réforme des subventions n’est qu’un traitement des symptômes lequel traitement n’aura aucun impact sur le mal. “Lever les subventions va automatiquement impliquer des augmentations salariales qui vont engendrer à leur tour une baisse de l’activité et de la compétitivité, respectivement des entreprises et de l’administration. Les retombées sociales d’une telle situation, notamment en termes de pouvoir d’achat, se traduiraient par  une paupérisation du salariat. C’est pour cette raison que j’appelle à revenir sur les raisons de la baisse de l’activité économique de la Tunisie” souligne-t-il.

Rectifier le tir en matière de budget 
Connu pour son pragmatisme, Nafaâ Ennaifer a commencé par décortiquer l’état des lieux et identifier le point de départ de ce cercle vicieux. Il n’est pas allé par quatre chemins pour expliquer que les vrais problèmes économiques et sociaux puisent leur origine dans le dérapage budgétaire. Un budget dont les postes importants de dépense ne cessent d’évoluer d’une année à l’autre, souligne-t-il. “Premièrement, nous avons un budget qui est passé de 17,4 Milliards de dinars en 2010 à 47 milliards de dinars en 2020. Et dans ce budget il y a deux grands postes qui ont énormément évolué, à savoir la masse salariale qui avoisine les 20 milliards en 2020 (c’est-à-dire plus du budget total en 2010) et le service de la dette qui est aux alentours de 11 milliards de dinars.

En d’autres termes, la masse salariale et les services de la dette constituent environ 64% du budget. Alors que le budget alloué à l’investissement est resté le même, soit aux alentours de 6 milliards de dinars depuis 2010. C’est-à-dire qu’il a, réellement, baissé de la moitié compte tenu  de l’inflation et de la dévaluation du dinar. C’est une aberration totale, dont la conséquence s’illustre à travers une forte pression sur les finances publiques avec la recherche d’économie sur certains budgets, notamment au titre de l’investissement. Mais ce dérapage budgétaire a, également, engendré une forte pression sur les budgets de subvention qui ne peuvent en aucun cas être réformés de manière précipitée et irréfléchie”, explique Ennaifer. Et d’ajouter qu’à l’instar de tous les pays, la Tunisie doit se doter d’une stratégie énergétique, notamment en matière de subvention énergétique qui s’inscrit dans le cadre d’une stratégie industrielle globale visant à améliorer la compétitivité du site Tunisie.

Ce qu’il faut réformer en premier lieu
Pour Ennaifer, il faut entamer les véritables réformes urgentes pour améliorer la qualité de vie du citoyen lambda. “Il faut commencer à diriger les moyens des ressources financières de l’Etat pour l’amélioration des service publics, en l’occurrence le transport, l’éducation et la santé, qui sont les seuls en mesure de permettre une amélioration réelle et pérenne du pouvoir d’achat sans avoir à augmenter les salaires à l’exception des salaires de la haute fonction publique. Il faut être déterminé pour réformer les entreprises publiques et les caisses sociales, qui sont génératrices d’une très grande hémorragie budgétaire.

Il s’agit, également,  d’assainir le climat des affaires en améliorant la performance de l’administration, la souplesse législative, ainsi que la performance logistique pour assurer un retour de confiance en le site Tunisie. Finalement, il est indispensable de mobiliser toutes les parties prenantes autour d’un objectif, à savoir l’augmentation de la productivité. Toutes ces actions-là vont améliorer réellement le niveau de vie des Tunisiens. Et toute levée non étudiée et précipitée sous la contrainte de la pression des bailleurs de fonds va générer inéluctablement des dérapages ailleurs et on va en payer, finalement le prix encore plus cher”, a-t-il conclu.

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